Joueuse de loto bingo assidue
Armande triture nerveusement la brosse aimantée qui lui permet de ramasser, d’une rotation souple du poignet ses pions sur le carton. Équipée comme une pro du numéro, elle n’en est pas moins fébrile. Une fièvre qu’elle adore sentir monter en elle au moins une fois par semaine. Histoire de caresser le destin sous ses doigts et humer l’odeur ménagère du frigo américain, du sèche-linge ou celui de l’écran plat. Dernièrement, elle a remporté les trois. Pas d’un seul coup bien sûr mais au fil de ses parties. Nombreuses et répétées. Le frigo a été revendu pour 800 euros, la télé offerte au petit dernier.
Cette assistante maternelle à Thorens-Glières ne cache pas sa passion. Née peut-être sous le coup des montées d’adrénaline. À Cluses, elle est passée à un numéro d’une voiture. Et depuis, elle pousse ses pions d’un ongle confiant. Au point même de parfois réserver ses places, en payant son carton à l’avance. Elle dépense rarement plus de 35 euros par soirée. Et mange avant pour ne pas être tentée par les sandwiches mis en vente par les membres de l’association initiatrice.Elle a abandonné les grigris mais comme la plupart des joueurs, a des chiffres fétiches. Elle s’amuse de ses voisins superstitieux. Quand il ne manque plus qu’un numéro, ils font glisser les pions sur la table et glissent le carton sous leurs fesses. Un geste finalement plein de « fondement ».
Le loto, elle le concède, « c’est tout un monde. » Avec ses habitués et ses mauvais joueurs. Ceux qui systématiquement déclarent « s’être fait avoir. » Mais qui reviennent toujours. Et que dire de ceux qui soufflent à l’organisateur comme à un chien de chasse « va chercher, va chercher. » Le bon numéro évidemment !
Durant les parties qu’elle vient de jouer au loto de l’Étoile cycliste annécienne, son téléphone a sonné trois fois. La famille vient aux nouvelles pour savoir ce qu’il faudra peut-être revendre sur internet. Si c’est un voyage, c’est sûr, elle le gardera. Encore que ! Elle raterait un loto. Et le plus beau des prix est toujours au bout de prochain carton.
Article sur la passion du loto écrit par Colette LANIER et paru dans Le Dauphiné Libéré du 30 mars 2010.